Moi, j’ai envie de me ramener avec « La route de Los Angeles » de John Fante. Parce que le quator Bandini est une tuerie, avec une punchline par paragraphe pour te faire cracher ta salive. Sur un ring de boxe face à un poids lourd. Fante écrit avec ses tripes et son cœur, ce qu’il a dans le fond du ventre, refusant de s’adonner à de fumeux exercices de pensées brumeuses, pompeuses, prétentieuses. Il connaît la déche et les sheitans qui se planquent au coin de la rue, la vie dans les quartiers merdiques et l’anti-rêve américain, et il écrit sur ça. C’est pas une source d’inspiration de Bukowski pour rien. Parce que des prunes, il en flanque quelques-unes. Et que derrière des mots crus, il y a plus de profondeur que dans beaucoup de textes écris par quelques illuminés, entre deux coupes de champagne, en costume trois pièces.
Et puis, voir un jeune écrivain se construire avec un mensonge pour seule fondation… Car, refusant de s’abaisser à la hauteur des « nègres » et autres mexicains, Arturo Bandini accepte de travailler dans une usine de poisson mais seulement sous couverture. Une couverture bidonnée qui tiendra en une phrase : « Je suis écrivain, et je veux écrire un livre sur le quotidien d’un immigré ayant raté sa vie ». Mais le mensonge le rattrape, et comme le fait dire Quentin Tarantino à un de ses personnages dans Reservoir Dogs : « C’est en racontant des histoires qu’on devient quelqu’un ». Et Arturo devient écrivain, bien que médiocre, entre quelques histoires de femmes découpées dans un magazine de lingerie, et les éternelles disputes familiales. Coeur et crachat sur vous.